jeudi, mai 04, 2006

Faux sceptiques

Un des traits les plus drolatiques du faux scepticisme est son inépuisable capacité à fournir des explications "rationnelles" plus irrationnelles et plus incohérentes encore que les superstitions qu'il prétend combattre. Je me rappelle quelques objections au témoignage de personnes affirmant avoir observé ensemble des bonnes vierges ou des petits hommes verts : il s'agirait d'un phénomène d'hallucination collective. Par malheur, je doute que la psychiatrie ait jamais recensé de délire connu sous ce nom. En tous cas, il n'est pas mentionné dans le DSM-IV. Idem, si certaines prédictions se réalisent, ce serait parce que le consultant a été influencé inconsciemment. Il faut d'abord remarquer que les mêmes sceptiques pourront s'opposer ailleurs à la notion d'inconscient qu'ils utilisent ici ; ensuite, cette opinion n'est qu'une variante de la superstition païenne confondant prédire un événement et jeter un sort. En bref, tout ce qui semble dévier tant soit peu de la convention la plus banale est rejeté sans analyse, "expliqué" par des arguments de comptoir ou classé dans le vaste dossier des "illusions cognitives encore inconnues".

Je n'ai pas le souvenir que le faux scepticisme se soit montré productif d'aucune manière dans le domaine scientifique. Cela n'a rien pour surprendre. La plupart du temps ses tenants n'en ont pas les compétences ou bien ne s'intéressent pas réellement aux disciplines sur lesquelles ils autoproclament leur autorité. Par contre, c'est en cherchant à dénombrer les démons que Neper inventa le logarithme ; c'est pour améliorer ses prédictions astrologiques que Kepler découvrit l'ellipticité des orbites des planètes et les lois qui régissent leur mouvement ; c'est pour photographier les fantômes que Crookes inventa le tube cathodique. La passion est créatrice. La répulsion n'a jamais engendré quoi que ce soit.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai l'impression de prendre une conversation en cours. ne manque-t-il pas un soubassement à ton article qui commencerait par identifier les critères qui séparent le faux sceptique du vrai ? quelque chose sur les prémisses de la démarche scientifique. Sinon, ceux que tu nomment faux sceptiques ne passent que pour des conservateurs aux convictions passéistes, que tu as déjà fait passer de nombreuses fois à la casserole et qui me font penser à cette phrase figurant dans un hommage rendu aux frères Wright : «Ils n'étaient pas assez savants pour savoir que c'était impossible. C'est pourquoi ils le réalisèrent.» Il faut apprendre à distinguer les opinions et les savoirs. .» La sensibilité aux preuves exige certaines précautions. Le doute doit-il venir de l'esprit ou des sens ?

Dado a dit…

>> John: J'ai l'impression de prendre une conversation en cours.

Je devais être en train de discuter avec moi-même ! :)))

>> Ne manque-t-il pas un soubassement à ton article [...] ?

Si tu le ressens comme ça, c'est probablement vrai.

>> [Ne faudrait-il pas d'abord ] identifier les critères qui séparent le faux sceptique du vrai ? Quelque chose sur les prémisses de la démarche scientifique ?

Pour moi, un scientifique est rarement sceptique, puisqu'il croit en la toute puissance de la raison.

Enfin, certaines personnes qui se prétendent sceptiques ne sont même pas capables d'utiliser correctement cette raison vénérée comme la Déesse de Robespierre. Pour la plupart, ils vont répéter deux ou trois "phrases qui tuent" (comme dit Flo), apprises par coeur et qu'on pourrait mettre à toutes les sauces.

De toutes façons, je ne pense pas qu'il existe de lien direct entre l'esprit scientifique et le scepticisme, vu que beaucoup de scientifiques ne sont pas sceptiques et beaucoup de "sceptiques" ne sont pas scientifiques.

Un vrai sceptique est le grec Pyrrhon qui se serait fait bouffer par un fauve pour avoir douté de sa réalité. Je doute d'ailleurs fort de la véracité de cette histoire... ;p

>> Le doute doit-il venir de l'esprit ou des sens ?

Je ne vois pas comment le doute pourrait venir des sens. Il est probablement du au taux d'une certaine hormone dans le cerveau (sérotonine ?) - il y a eu d'ailleurs une expérience rigolote à ce sujet, mais je n'arrive plus à la retrouver sur Internet :( - d'une attitude socialet et d'une définition culturelle de la réalité : donc en bref de l'"esprit".

Anonyme a dit…

A propos j'en avais lue une bien bonne sur un magazine "sérieux", genre VSD. On y expliquait que la combustion spontanée arrivait aux petits vieux qui s'endormaient à côté des radiateurs. En effet, chacun sait qu'il est scientifiquement prouvé que quand on met un tas de graisse à côté d'un radiateur qui chauffe à 50°, le gras peut accumuler la chaleur et monter à 2000°. Véridique.

Dado a dit…

Lol! En tous cas, c'est bien curieux ces "combustions spontanées". Je penche plutôt sur une explication naturelle et décevante, basée sur la constatation que le phénomène est systématiquement lié au fait qu'on ne puisse pas l'observer.