jeudi, novembre 03, 2005

Les fantômes du lac II

Pour surenchérir sur le commentaire de Flo, je remarquerai que la plupart des lacs de montagne se voient attribuer des légendes, ce qui n'est pas le cas des lacs de plaine. Dans les Pyrénées, le lac de Gaube est décrit par Victor Hugo comme "la flaque d'eau la plus verte, la plus gracieuse, la plus jolie, la plus gaie, entourée de rochers hideux, mâchés, déformés, ruinés, terribles." Si je ne me trompe pas, c'est au bord de ce lac que l'on peut voir une croix commémorative de la noyade d'un couple d'amoureux anglais. La légende dit - encore une fois - qu'ils périrent le jour de leurs noces lors d'une ballade en barque ; et qu'à chaque anniversaire de leur mort, le promeneur qui arpente les bords entend les cloches d'une église fantôme sonner au fond du lac meurtrier...

De même, au pied des Monts d'Olmes, il y a deux petits lacs charmants. Le premier porte le nom inquiétant de lac du Diable, le second plus paisible de lac des Truites. Cela ne devait pas paraître suffisamment symétrique aux géographes car il était baptisé par erreur lac des Druides sur une de mes cartes IGN.

Tout cela me rappelle une petite anecdote. J'avais passé quelques jours avec une amie dans la jolie vallée d'Oueil au dessus de Bagnères de Luchon. Le soir tombé, on peut voir des biches et des faons paître sur les collines. Mon amie connaissait bien le vieux maire d'un des villages et nous allâmes lui rendre visite pour lui demander des idées de randonnée. Il nous proposa de rejoindre le lac de Bareilles par le col de Pierrefite . Nous eûmes de plus la primeur des deux histoires suivantes.

Il y a quelques années fut dégagée une esplanade de terre au col de Pierrefite, de sorte que le touriste intrépide qui, après avoir parcouru en voiture plusieurs kilomètres de piste défoncée, n'a pas versé dans le ravin puisse aisément se garer. Pierrefite signifie en patois la "pierre plantée" et il y a là en effet depuis des temps immémoriaux une pierre debout, visible du village au fond de la vallée. Elle est taillée dans un marbre clair qui ne se trouve pas à proximité et les villageois l'appellent la Dame Blanche. Mais les engins de chantier de la DDE ont à plusieurs reprises très voltairiennement prouvé le peu de cas qu'ils font des superstitions ; ils renversèrent la pierre. A partir de ce triste jour, les habitants de Bourg d'Oueil se sentaient esseulés. Habitués à voir sa silhouette, chaque regard vers le col ne leur renvoyait plus que l'écho d'une absence désolée. Il n'est pas facile d'exprimer à son voisin un sentiment aussi irrationnel mais finalement ils se rendirent compte qu'ils partageaient tous la même impression. Les hommes montèrent au col et remirent la pierre sur pied.

Plusieurs années plus tard, j'ai découvert dans un livre sur les légendes pyrénéennes qu'une grotte près du col était dite abriter des fées.

Maintenant, je n'ose raconter la seconde anecdote : je crains qu'elle ne comporte quelques invraisemblances propres à jeter, aux yeux de mon sceptique lecteur, le discrédit sur la véracité de la première. Toujours selon notre charmant informateur, le lac de Bareilles est incroyablement profond : situé à 1800 mètres d'altitude en plein centre du massif pyrénéen, il communiquerait avec la mer. Certains affirment que, comme son homologue le loch Ness, il y aurait un monstre à l'intérieur - mais notre bon maire n'y croit pas, ce ne sont bien sûr que des légendes ; à preuve, l'équipe du commandant Cousteau y a plongé mais n'a pas découvert de monstre... non plus d'ailleurs que de fond !

Mes photos du lac de Bareilles étant bien mauvaises, j'en ai emprunté une sur le site Pyrénéisme, dont voici le lien.

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