jeudi, novembre 02, 2006

Le livre noir de la psychanalyse

Dans un commentaire à l'article précédent, roul émet cette remarque : «le problème avec Freud, c'est qu'il a modifié beaucoup de ses histoires pour les faire correspondre à ses désirs ( cf. Le livre noir de la psychanalyse ). »

On trouvera plus d'informations sur cet ouvrage dans la Wikipédia.

Je n'avais pas l'intention d'entrer dans cette polémique. Je ne connais d'ailleurs pas ce livre et je ne compte pas le lire : son seul titre me répugne. Mais ma réponse est longue et je vais la publier ici.

Je préciserai qu'à l'origine, ma phrase où il était question - entre autres ! entre autres ! de Freud était rédigée différemment. Au lieu de : « on continue, par pure conviction, à nier les observations », il y avait : « de nombreux scientifiques - en particulier les scientifiques chrétiens, paix à leur âme - continuent etc. » Un peu plus loin, il était question « de Freud et de ses plus brillants collaborateurs ». Cette phrase était suivie d'une note de bas de page dont voici l'intitulé : « Je ne parle bien sûr pas ici de Jung et de Lacan. » Finalement, je me suis dit que ces invectives débordaient du cadre de mon article et je les ai supprimées.

Mais comme on a réussi à les lire entre les lignes, je me vois contraint d'exprimer mon avis.

Ce que je constate surtout, c'est que les personnes qui essaient vainement de réfuter Freud - en conséquence Maury et des dizaines d'observateurs du rêve avant lui - ont de mauvaises bonnes raisons de le faire.

Certains attaquent la théorie : on a pu lire ainsi toutes sortes d'âneries dans la littérature scientifique, comme « l'inconscient n'existe pas », alors qu'il est reconnu que la majeure partie de notre cerveau fonctionne hors du domaine de la conscience. En neurobiologie, tout ce qui se découvre récemment est du Freud ; mais on fait bien attention d'utiliser des termes différents des siens lorsqu'on évoque les circuits de la récompense et de la punition. La plupart des observateurs attentifs des mécanismes du rêve et de la pensée, qu'il s'agisse d'artistes comme les surréalistes ou de religieux comme certains moines tibétains retombent nécessairement sur les "découvertes" de Freud. Pour ma part, j'ai lu une dizaine de ses ouvrages ; c'est très intelligent et subtil. Freud est un excellent observateur ; il a passé sa vie à noter ses rêves et ceux des autres ; il a un esprit logique, délibérément scientifique ; il ne se fait pas beaucoup d'illusions sur l'espèce humaine ; il ne sacrifie pas aux concessions.

Aussi y a-t-il très peu à redire sur les mécanismes qu'il éclaire et ce ne sont pas des rêveurs occasionnels du dimanche qui pourront prétendre à le réfuter. Comme la neurobiologie n'existait pas à son époque, il utilise des termes généralistes. Son modèle de la psyché n'est sans doute pas tellement exact. On peut contester le principe même de l'interprétation. Mais on n'a jamais fait tout un foin parce que le modèle de l'atome de Bohr, ou du système solaire de Kepler, était imparfait !

Comme la théorie est inattaquable - ou en tous cas ceux qui s'en prennent à elle ne sont pas assez malins pour parvenir à l'ébranler et ne démontrent ce faisant que leur propre bêtise ; comme la pratique psychanalytique rencontre quelques succès sur certaines névroses et ne peut être abattue si simplement non plus, alors maintenant on essaie de démolir le bonhomme ; il aurait menti ; on a créé une légende autour de lui ( cet argument est idiot car une légende se crée automatiquement autour de tous les personnages célèbres, à commencer par Einstein ). En histoire, ce genre de pratique douteuse a un nom : ça s'appelle du révisionnisme.

Ainsi, lorsqu'on constate les efforts démesurés pour discréditer le personnage, on peut seulement se demander quelles "mauvaises bonnes raisons" poussent certains individus à réagir aussi violemment. Personnellement, j'en vois surtout deux :

1) une lutte contre le statut non médical du praticien psychanalyste. Mais en vérité, cela concerne le conseil de l'ordre et n'a rien à voir avec la validité de ses théories.

2) des opinions religieuses convaincues ( c'est le cas de la plupart de ses détracteurs anglais et américains ) ; en effet, Freud affirme que les activités mentales "supérieures" de l'être humain, comme l'art et la religion, sont dues à la sublimation de l'instinct sexuel. Je ne pense pas que cette idée, vraie ou fausse, choquerait outre mesure un hindouiste ; mais curieusement, c'est très blessant pour un chrétien et cela semble justifier l'autodafé de son oeuvre complet.

Quoi qu'il en soit, il est certain que la psychanalyse présente des failles systémiques. Exploitées par ces charlots de Jung et Lacan avec leur charabia fumeux, elles ont grandement contribué à son discrédit. Toutefois, étonnamment, c'est toujours Freud qui paie les pots cassés.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

salut dado,

Le livre noir de la psychanalyse je n'en est lue que 300 pages mais ressemblais plus à un reglement de compte des comportementalistes envers la psychanalyse...

le reproche que je fait vis à vis
de cet forme de therapie c'est qu'elle essaye de guerir la pensée et etaye integralement sont diagnostique sur cet pensée (en fait elle en engendre d'autre ??).

freud essayant d'arretter de fumer decrit la cigarette "comme un substitu du sein maternel",ce genre d'approche totalement 'du mental' ne permet pas d'envisager une guerison (c'étais un exemple)...

et jamais perdu de vue ce que disais ses premiers detracteurs "la psychanalyse crée les maladie qu'elle est sensée guerir"...

je trouve ca terrible de ce voir etiquetter (ex : paranoîa) sans possibiliter de guerir, surtout si on accorde une qualité d'expertise
à la personne qui juge.

et pourtant j'ai un grand respect pour freud qui souhaitais sincerement guerir les souffrances.

Tcho tcho dado

ps : merci pour jules vernes ;-)
je ne suis en aucun cas un specialiste de la psychanalyse, mais ca reste un bon departs (100 ans ca reste jeune pour un domaine).

Anonyme a dit…

j'avais pas vue ce point important..

"en effet, Freud affirme que les activités mentales "supérieures" de l'être humain, comme l'art et la religion, sont dues à la sublimation de l'instinct sexuel. "

ca c'est trés juste... et pour moi incontestable.. par contre je ne comprend pas pourquoi ca blesserais un chretien,la sublimation spirituel ne passe t'elle pas par une sublimation de "l'instinc sexuel"..??

quand même passionant ce sujet..

Anonyme a dit…

Bien sûr que Freud s'est gourré. L'instinct sexuel est une dégradation de l'instinct religieux ! Il met tout cul par-dessus tête. Je ne pense pas qu'un chrétien s'offusquerait outre mesure si on lui expliquait que Dieu est Béatitude et que le sexe en est une dégradation, ce qui est très exactement le cas (pratique tumo, tu pourras le vérifier par toi-même). Alors qu'on voit très bien ce qu'il y a de provocateur dans ce que prétendait Freud - et en plus c'est faux. Normal qu'on lui tombe dessus.

Dado a dit…

>> roul : le reproche que je fait vis à vis de cet forme de therapie c'est qu'elle essaye de guerir la pensée et etaye integralement sont diagnostique sur cet pensée (en fait elle en engendre d'autre ??).

Je ne vois pas en quoi c'est un reproche. Un névrosé a bien un problème de conflits de croyances. Pour le résoudre il faut diagnostiquer de quelles pensées viennent le problème ; puis en engendrer d'autres de manière à lui donner un autre système de croyances plus viable.

La possible erreur de Freud, c'est d'avoir supposé que le comportement était seulement un symptôme du système de croyances et donc que modifier le comportement ne changerait rien. Or il est possible que système de croyances et comportement sont comme deux plans parallèles qui se reflètent. Auquel cas, la modification du comportement entraîne aussi la modification du système de pensée, d'où la guérison.

>> la psychanalyse, ca reste un bon departs (100 ans ca reste jeune pour un domaine).

Freud lui-même avait pressenti la fin de la psychanalyse à court terme. Il pensait que très rapidement, on trouverait des médicaments pour soigner ce type de maladies. Mais à son époque, c'est le seul qui arrivait à soigner certains trucs incurables et totalement destructeurs, genre névroses phobiques et hystériques. Ces maladies étaient répertoriées et connues à l'époque, il y en avait plein et ils étaient certainement dus à la répression sexuelle très forte ainsi qu'au statut social de la femme. Aussi les détracteurs qui disent que "la psychanalyse crée les maladies qu'elle est sensée guérir" sont complètement aveugles.

>> par contre je ne comprend pas pourquoi ca blesserais un chretien, la sublimation spirituel ne passe t'elle pas par une sublimation de "l'instinc sexuel"..??

Dit comme ça, ça ne semble pas poser de problème. Mais c'était très choquant à l'époque et ça continue à l'être dans certains milieux puritains comme les Etats-Unis. De plus, ce n'était pas tout à fait présenté aussi joliment.

>> Flo: L'instinct sexuel est une dégradation de l'instinct religieux ! [...] Dieu est Béatitude et le sexe en est une dégradation.

Ce n'est pas tout à fait ce que tu disais dans ton article sur Le Sesque :

http://www.blogchen.net/flo/index.php?2006/09/21/348-le-sesque

Et je ne suis pas d'accord avec ton "instinct religieux". A mon avis, tant qu'on mélange tout, c'est à dire :
- concernant la religion : d'une part ce croit que c'est, ce qu'on en fait, ses dogmes, d'autre part la recherche de la nature de l'esprit ;
- concernant le sexe : idem, d'une part ce qu'on croit que c'est, ce qu'on en fait, la sensualité et les habitudes, d'autre part l'énergie;
on n'est pas sorti de l'auberge.

Freud part sur l'observation des personnes de son entourage et des malades. Il ne fréquente pas un ashram ou une sangha ni des êtres réalisés. Ce qu'il décrit correspond exactement à la purée mentale que l'on peut encore expérimenter de nos jours. Pour les artistes, tu lis Frankenstein par exemple et tu es mort de rire, c'est quasiment du premier degré. Et pour la religion, tu vois les représentations médiévales d'Adam et Eve chassés d'Eden, avec la porte du paradis représentée comme une grosse vulve, et là non plus il n'y a pas besoin de chercher midi à quatorze heures. Et ce ne sont que deux exemples parmi des centaines.

Anonyme a dit…

Rahhh, il le fait exprès... ce que je veux dire c'est que le sexe tel que pratiqué par l'animal humain est une dégradation du bliss primordial, une très pâle copie. Je ne parle pas de l'union tantrique telle que faite pour parvenir à la 8è terre. On peut aussi dire que la religion est une dégradation de la clarté.

Dado a dit…

J'ai bien fait de faire exprès. Maintenant, ce que tu dis me paraît plus clair (enfin, sauf l'union trantrique et la 8ème terre, là c'est des trucs de spécialistes). :p