Je ne sais pas si c'est une coïncidence ou si Flo, après avoir lu mon dernier article, a choisi de publier ce contrepoint. Mais la chose importe très peu en fin de compte.
Je dois reconnaître que mon texte ne m'a pas beaucoup convaincu. Un premier jet avait été écrit en sortant du sommeil. Trois jours après, il ne me satisfaisait plus du tout ; c'était de l'exaltation pure. J'ai voulu le retoucher. J'ai "désaturé" mon point de vue en rajoutant des arguties sans intérêt sur Platon et Socrate. Cela n'a fait qu'embrouiller le sujet. On ne retrouve plus le texte d'origine que dans les deux derniers paragraphes. Toutefois, si je suis d'accord avec ce que je dis sur le mensonge, chose amusante, je ne le suis pas sur ce que j'affirme de la vérité. Il y a quelque chose là-dedans qui cloche et qui détone. Ce n'est pas complètement faux mais c'est très loin d'être vrai aussi.
Alors que j'étais en train de me tracasser la tête à ce propos - ce qui n'est jamais bon signe ; quand vous êtes dans le vrai, vous ne vous posez pas de question - je tombe sur le témoignage que Flo met en exergue. Pour moi, je le prends au sérieux car une part de ce sentiment m'est connue ; ou plus précisément, et c'est ce qui m'étonne, j'ai eu l'occasion d'éprouver tour à tour plusieurs aspects du sentiment qui est là décrit.
Par exemple, je sais qu'il est possible de se retrouver dans un état où le monde, avec ce qu'il compte de difformités ou peut-être justement grâce à elles, est d'une beauté parfaite. Cette impression va de pair avec la sensation que le coeur s'enflamme ; les larmes vous viennent aux yeux sans raison. Cela me semble peu différent de l'amour mis à part qu'il n'existe pas de réceptacle, pas d'objet, pas de personne aimée. C'est un état d'exaltation et je ne crois pas qu'il puisse être durable : il me semble devoir consommer beaucoup trop d'énergie. Dans mon cas, la cause en est souvent une forte émotion qui m'éjecte de ma routine. Je l'ai éprouvée deux fois durant les dernières semaines mais je n'en ai pas parlé car je répugnais à mettre des mots dessus et je ne savais pas par quel bout commencer.
Il m'est aussi arrivé de savoir intuitivement à propos des gens ou à propos des choses. Mes amis ainsi se moquent bien assez de me voir critiquer une oeuvre littéraire ou cinématographique d'après le titre uniquement. Mon souvenir le plus horrible est celui de ma visite à la petite salle des antiquités aztèques au British Muséum. Ce peuple était complètement timbré. Je ne garde pas non plus une très bonne impression de l'Egypte Ptolémaïque - très peu différente du stalinisme - ni de la Toscane médiévale. Dans la rue, je vois fréquemment sur le visage des gens le résumé de leur souffrance. Soit dit en passant, n'avez-vous d'ailleurs pas remarqué la différence frappante qui existe entre leur visage et leur corps ? Mais je pense que cette intuition est chose commune : ainsi - c'est assez drolatique - on retrouve le même sentiment dans l'autobiographie de Jacques Mesrine au moment précis où, se rendant compte de la souffrance de ses concitoyens, il prit la décision remarquable de devenir cambrioleur.
Je ne sais pas trop quoi penser de cela. Mais n'est-il pas extraordinaire que ce que certains appelleront sagesse sera considéré par le monde et ses psychiatres comme la plus évidente des folies ? Cela peut donner à réfléchir à ceux qui espèrent encore que l'être humain est seulement déraisonnable.
Je pense enfin que, lors de l'interview, la personne n'était plus dans cet état et qu'elle n'évoquait plus qu'un souvenir.
1 commentaire:
Quoi qu'il en soit le coup des statuettes mexicaines est quand même balaise. Evidemment il n'y a pas de preuve, mais j'y crois, parce que les lamas disent exactement la même chose. Ou il y a aussi le cas d'Amma qui dit qu'elle se rappelle de tous les gens qu'elle a embrassés à ce jour(20 millions, je crois). Et je la vois mal mentir.
Et sinon c'est une coïncidence, je n'avais pas encore lu ton article.
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